Quand on parle de pneumatiques sur le Trophée Tourisme Endurance, on parle toujours de Pirelli. Le manufacturier italien est présent depuis 2017 en tant que partenaire et manufacturier officiel de plusieurs de nos plateaux.
Baptiste Henry, responsable compétition auto chez Pirelli France, nous apporte aujourd’hui quelques explications sur le rôle de manufacturier pneumatique.
Tout d’abord, pouvez-vous nous présenter l’entité Pirelli ?
« Pirelli est un manufacturier pneumatique créé en 1872 dont le siège est à Milan en Italie. Acteur majeur de l’industrie du pneumatique dans le monde de l’auto, la moto et du vélo, l’entreprise est le cinquième manufacturier mondial et embauche 31 000 personnes dans plus de 160 pays. Nous disposons de 19 sites de production à travers 13 pays et quatre continents.
La Compétition fait partie de l’ADN de la marque depuis plus de 110 ans. Cela se traduit par une présence dans des programmes officiels comme la F1 et le WRC, ainsi que la compétition-client à une échelle européenne/multi-pays et nationale. Nous sommes présents dans plus de 350 championnats à travers le monde : 230 championnats auto et 120 moto.
À l’échelle de la France, nous distribuons des pneumatiques de tourisme (auto, moto), vélo ainsi que des pneumatiques de compétition (auto et moto). Nous disposons d’une large gamme de produits pour le circuit, le rallye (moderne, historique, terre), course de côte et trackdays que nous distribuons via différents championnats et séries partenaires, à l’instar du TTE. »
Pouvez-vous nous présenter les pneumatiques que les concurrents utilisent sur les épreuves du TTE ?
« Les pneumatiques de compétition client sont produits à Izmit, en Turquie. La production est standardisée ce qui signifie qu’un pneumatique vendu en Chine, Argentine et en France possède les mêmes spécifications et caractéristiques.
Chaque pneumatique est un ensemble de compromis fabriqué selon un cahier des charges complexe pour leur assurer une polyvalence à toute épreuve. Une même référence peut par exemple être utilisée sur des formats de courses variés (sprint, endurance), sur différents modèles de véhicules (traction, propulsion, GT, Touring Car), et dans différents types de conditions (chaudes sur circuit abrasif, froides sur circuit peu abrasif) avec des pilotes professionnels ou des gentlemen driver. S’ajoute à cela les réglementations respectives de chaque série (quota, format des courses…). La fenêtre d’utilisation du pneumatique doit donc prendre en compte tous ces éléments et offrir à chaque fois le meilleur ratio performance, endurance et sécurité.
Pirelli a également la particularité de faire du « tailor made » en concevant des pneumatiques dédiés à un championnat et à un cahier des charges bien spécifique. A l’image de notre pneumatique de Clio Cup et son composé DHH (dur dur) qui a été conçu exclusivement pour le TTE.
C’est ce qui permet aux concurrents de rouler avec un composé unique tout au long de l’année.
Nous proposons donc deux types de pneumatiques sur chaque épreuve dans différentes dimensions : le slick et le pluie à chaque fois dans un composé « dur ». C’est ce qui convient le mieux à la réglementation en vigueur et au format des courses. Ce composé unique permet d’éviter une course à l’armement et ainsi maîtriser les coûts, et assurer une certaine équité sportive pour tous les concurrents.
Les pneumatiques 13’’ utilisés en Formula’Cup et Proto sont un cran plus tendre (medium), tandis que les pluie « Cinturato » sont ceux de notre gamme course de côte. »
La logistique doit être un vrai défi ? Comment faites-vous pour prévoir et vous organiser ?
« La logistique est un défi de tous les jours en sport automobile. C’est encore plus vrai avec la période que nous traversons actuellement. La saison qui se profile devrait être une saison condensée sur 4 mois avec des évènements qui se chevauchent et s’enchaînent. À cela s’ajoute l’incertitude qui plane sur le remplissage des plateaux. La production Pirelli est une production à flux tendu, c’est à dire que nous produisons selon un prévisionnel de vente ajusté tous les mois. C’est un exercice complexe puisqu’il faut traduire les informations terrain (liste des engagés, météo) en besoin pneumatiques et toujours avoir une petite marge de sécurité. Cela nécessite une coordination parfaite entre la logistique, la production et la force de vente.
Une fois fabriqué en Turquie, les pneumatiques sont ensuite acheminés en Italie puis expédiés dans les filiales. En France, les pneumatiques sont stockés chez notre distributeur exclusif compétition (IVALTO) qui est en charge de la commercialisation et la distribution sur les évènements et en vente à distance. »
Quel est votre rôle sur le terrain en tant que manufacturier ?
« En tant que manufacturier exclusif, Pirelli se doit de fournir les pneumatiques aux concurrents sur toutes les épreuves et le service qui va avec. Pour faire bref, nous déchargeons les concurrents du sujet « pneumatiques ». Cela passe par le transport, la vente, le montage/démontage mais également un support et conseil technique.
Dans les faits, nous venons avec deux ou trois camions sur chaque épreuve, soit 800 pneumatiques en moyenne. Il ne faut pas avoir seulement avoir beaucoup de stock, il faut surtout avoir les bonnes dimensions et les bons composés en bonne quantité au bon moment.
En ce qui concerne le staff, nous venons avec au minimum cinq monteurs, deux personnes du distributeur en tant qu’interface commercial dont un qui a la casquette d’ingénieur châssis.
Nous sommes opérationnels du vendredi au dimanche, période pendant laquelle nous montons des pneumatiques aux plateaux fournis par Pirelli, mais également aux plateaux où le choix pneumatique est libre. Afin de fluidifier et d’étaler le montage tout au long du weekend pour toutes les catégories, nous avons mis en place des horaires de montage. L’idée n’est pas de contraindre les concurrents, mais au contraire, de poser un cadre pour éviter d’engorger la structure et de les faire attendre. »
Concernant ce quota de pneumatiques, comment avez-vous géré cette évolution ? Y avez-vous participé ?
« Toute décision sportive ou changement de réglementation revient au promoteur, mais en tant que partenaire pneumatiques (et donc concerné par le sujet), j’ai forcément été consulté.
L’idée de mettre en place un quota pneumatique a germé en milieu d’année dernière dans la tête des organisateurs. Plutôt que d’imposer cette idée aux concurrents, nous avons échangé avec eux sur leurs avis et attentes, et ce qu’impliquait la mise en place d’un quota.
Mon rôle a été de m’assurer que la volonté du TTE concorde avec les caractéristiques de nos produits. Mettre en place un quota est louable, mais cela ne doit pas empiéter sur la l’intégrité du produit, et donc la sécurité.
Pour définir ce quota, nous avons analysé les habitudes de consommation des équipes depuis 2017, puis le TTE a acté du quota de huit pneumatiques en se réservant le droit de le modifier selon certaines conditions (caractéristiques météos/circuit, durée de la course). »
Quels sont les retours des concurrents à propos de cette mesure ?
« Les retours sont plutôt positifs. Certains voulaient plus, d’autres moins. Il est difficile de donner entière satisfaction à 100% du plateau. Il y a tellement de profils de pilotes, teams et voitures différents. Certains comprennent que l’endurance veut dire gestion pneumatiques, d’autres voudraient faire du sprint pendant 4h. Avec le recul des trois premiers meetings, force est de constater que les mécontents sont très peu nombreux.
Le quota pneumatique est de toute manière dans l’ère du temps. Cela fait partie de la norme dans la plupart des championnats de ce calibre. Cela permet de maîtriser les coûts, assurer une certaine équité sportive pour tous les concurrents et éviter une dérive qui pourrait être néfaste à la santé et l’attractivité du championnat. »